ANGELO NESTORE
Selección de poemas de “Actos impuros”, Hiperión, 2017
XXXII Premio de poesía Hiperión
Si mi padre me dice
Si mi padre me dice: Sé un hombre
yo me encojo como una larva,
clavo el abdomen bajo el anzuelo.
Blando, como un molusco sin concha,
me siento desmantelado, aguanto el tipo.
Me pregunto entonces
de qué sirve haber aprendido cuatro idiomas
si las palabras no se oyen bajo el agua,
si solo sé escribir poemas.
Monstruo
Deseo levantar sospechas,
que los hombres me griten en la calle,
quiero pasear por centres comerciales, parques públicos
y que madres como mi madre levanten y bajen la mirada
y luego, mientras preparan la cena para sus hijos,
les asalte brevemente el recuerdo de una raza nueva de
hombres.
Apocalipsis masculino
El mundo vuelto del revés:
las vísceras por fuera,
el pene y los testículos escondidos en el pecho.
De cuando me equivoqué de bar
Yo soy de esa clase de amigos
que siempre pide otra ronda en los bares.
No tengo hijos,
soy el hijo único de una dinastía de bastardos
que se llena el estómago y se autodestruye.
Mis amigos, sin embargo, son padres,
de esos que buscan una excusa para volver tarde a casa,
siempre me invitan a otra,
nunca quieren que me vaya.
Ellos me miran y cien veces
me cuentan cien veces lo difícil que es
la suerte que yo.
Ellos no ven las hormigas que trepan por mi pierna,
no las ven.
Beben tiempo con su boca de padres,
tragan tiempo con su saliva de padres
y yo me vuelvo cada vez más pequeño
y sus hijos cada vez más grandes.
Y con cuarenta, con cincuenta,
volveré al mismo bar de la esquina
y entonces los que hoy son niños se preguntarán por qué
tantas hormigas en mi boca,
por qué el amigo de sus padres se sigue creyendo joven.
Con cincuenta, con sesenta,
quién me llevará a casa,
quién guardará mis huesos bajo las sábanas.
Con sesenta, quizás, con setenta
quién contestará a mis preguntas,
quién me dirá lo difícil que es,
la suerte que yo
cuando un día me confunda y pida otra ronda
frente a la sola luz de mi nevera.
El prospecto
Usted no puede dar a luz.
Ahora. Ni nunca.
Hágase a la idea.
Usted no puede dar a luz. ¿Acaso no leyó el prospecto?
Le recomiendo que no vuelva a escribir sobre el tema,
podría acabar en depresión.
Considere la opción de un animal doméstico.
Póngale nombre, hágale fotos, súbalas a las redes sociales,
verá cómo crecen los me gusta en las publicaciones,
cómo decenas de amigos le alivian su dolor.
No lo olvide: la ciencia es exacta, nunca engaña.
Pero anímese, usted es muy valiente, yo le admiro,
su elección sexual es un acto de resistencia.
Se llora por los muertos, no por los que no han nacido.
No tiene usted motivos para estar triste.
ANGELO NESTORE
Traduction de Miguel Ángel Real
Si mon père me dit
Si mon père me dit: Sois un homme
je me recroqueville comme une larve,
j'enfonce mon abdomen sous le hameçon.
Mou, comme un mollusque sans coquille,
je me sens démantelé, je tiens le coup.
Je me demande alors
à quoi sert d'avoir appris quatre langues
si on n'entend pas les mots sous l'eau,
si je ne sais qu'écrire des poèmes.
Monstre
Je souhaite éveiller des soupçons,
que les hommes me crient dessus dans la rue,
je veux me promener dans des centres commerciaux, des parcs publics
et que des mères comme ma mère lèvent et baissent le regard
et après, pendant qu'elles préparent le dîner pour leurs enfants,
que le souvenir d'une nouvelle race d'hommes les assaille
brièvement.
Apocalypse masculin
Le monde à l'envers :
les viscères en dehors,
le pénis et les testicules cachés dans la poitrine.
Du jour où je me suis trompé de bar
Je suis de ce genre d'amis
qui demandent toujours une autre tournée dans les bars.
Je n'ai pas d'enfants,
je suis le fils unique d'une dynastie de bâtards
qui se remplit l'estomac et s'autodétruit.
Mes amis, cependant, sont des parents,
de ceux qui cherchent une excuse pour rentrer tard à la maison,
ils m'invitent toujours à un autre verre,
ils ne veulent jamais que je parte.
Ils me regardent et cent fois
ils me racontent cent fois à quel point c'est difficile
la chance que je.
Ils ne voient pas les fourmis qui grimpent sur ma jambe,
ils ne les voient pas.
Ils boivent du temps avec leur bouche de parents,
ils avalent du temps avec leur salive de parents
et je deviens de plus en plus petit
et leurs enfants de plus en plus grands.
Et à quarante, à cinquante ans,
je retournerai dans le même bar au coin de la rue
et alors ceux qui aujourd'hui sont des enfants se demanderont pourquoi
tant de fourmis dans ma bouche,
pourquoi l'ami de leurs parents croit toujours qu'il est jeune.
A cinquante, soixante ans,
qui me conduira chez moi,
qui gardera mes os sous les draps. A soixante ans, peut-être, à soixante-dix
qui répondra à mes questions,
qui me dira à quel point c'est difficile,
la chance que je
quand un jour je me tromperai et que je demanderai une autre tournée
devant la seule lumière de mon réfrigérateur.
Le prospectus
Vous ne pouvez pas accoucher.
Ni maintenant. Ni jamais.
Il faut se faire à l'idée.
Vous ne pouvez pas accoucher. Mais vous n'avez pas lu le dépliant ?
Je vous conseille de ne pas écrire encore une fois à ce sujet,
cela pourrait finir en dépression.
Réfléchissez à l'option d'un animal de compagnie.
Donnez lui un nom, prenez en des photos, mettez-les sur les réseaux sociaux,
vous verrez comment augmentent les j'aime dans les publications,
comment des dizaines d'amis soulagent votre douleur.
N'oubliez pas : la science est exacte, elle ne vous trompe jamais.
Mais allons, vous êtes très courageux, je vous admire,
votre choix sexuel est un acte de résistance.
On pleure pour les morts, pas pour ceux qui ne sont pas nés.
Vous n'avez pas des raisons d'être triste.