ANGEL MANUEL GÓMEZ ESPADA

Poemas de « Ventana de emergencias », Ed. Huerga y Fierro, Madrid, 2018

 Traduction de Miguel Ángel Real

NUNCA busques supervivientes

entre las ruinas.

Podrías encontrar

a quien menos te lo esperes.

A ti mismo,

por poner un ejemplo.

DE LOS IDIOTAS SE APRENDE

Pero incluso entre las guerras a veces hay pausas

WISLAWA SZYMBORSKA

Aprendo mucho de los idiotas.

Les presto una atenciôn exagerada.

Para no resbalar nunca, como ellos.

Pero he de reconocerlo: les profeso pánico,

un pánico atroz.

Nunca sabes por dónde van a surgir,

de qué esquina, de qué casa.

Ellos te odian tanto como tú a ellos.

Huelen tu miedo y eso les excita,

les hace superiores.

Tus dudas les conceden el poder.

POEMA QUE SALE REPUBLICANO SIN QUERER

En un poema, una mariposa siempre hace bonito.

Una manada de nubes desbocadas o un lazo azul también.

Pero hay otras cosas que no.

Que definitivamente no,

no hacen ningún favor al poema.

Como estercolero, alcantarilla, o charco.

Incluso la palabra "rey" ya molesta.

(No digamos ya "reina").

Los reyes antaño eran más campechanos.

Hoy no tanto.

Sin embargo, si fuéramos capaces de tropezar

con una mariposa en un estercolero;

o tuviéramos que descender

a la oscuridad de las alcantarillas

para contemplar un racimo de nubes;

o encontráramos un lazo azul

embarrado en un charco de sangre,

ahí sí que destilariamos algo de poesía.

Pero con un rey, nada de nada.

Con un rey no se me ocurre nada

esta tarde de primavera

para arreglar un poema.

Están de capa caída los reyes.

Afean todo lo que tocan.

Incluso los estercoleros.

Incluso las alcantarillas.

(Por supuesto, no seré yo quien proponga

colocar en un poema a un rey

dentro de un charco de sangre. La educación que he recibido me lo impide).

DISNEYLANDIA

Cuando regreso del trabajo, ya estás despierta.

Mientras te duchas, preparo el desayuno.

Después te vas al trabajo, y yo me acuesto.

Pero antes me gusta que me arropes y me des un beso

que nunca sabemos si es de buenos días o de buenas noches.

Cuando alguien nos habla de tener niños, reímos al unísono,

ante la mirada atónita de los detectives privados de turno.

Queréis Disneylandia, pero Disneylandia no existe.

Es una marca.

Y nadie vive dentro de una marca,

¿verdad?

ANGEL MANUEL GÓMEZ ESPADA

Poèmes de « Ventana de emergencias », Ed. Huerga y Fierro, Madrid, 2018

Traduction de Miguel Ángel Real

Ne cherche jamais de survivants

entre les ruines. Tu pourrais retrouver

celui que tu attends le moins.

Toi même,

par exemple.

ON APPREND DES IDIOTS

Mais même entre les guerres il y a parfois des pauses.

WISLAWA SZYMBORSKA

J'apprends beaucoup des idiots.

Je leur accorde une attention démesurée.

Pour ne jamais glisser, comme eux.

Mais je dois l'avouer : je leur professe une peur bleue,

une panique atroce.

Tu ne sais jamais de quel côté ils vont surgir,

de quel recoin, de quelle maison.

Ils te détestent autant que tu les détestes.

Ils sentent ta peur et cela les excite,

les rend supérieurs.

Tes doutes leur accordent le pouvoir.

POEME QUI NAÎT RÉPUBLICAIN SANS LE VOULOIR

Dans un poème, un papillon, cela fait toujours joli.

Un troupeau de nuages débridés ou un ruban bleu aussi.

Mais d'autres choses non.

Définitivement non,

elles ne rendent aucun service au poème. Comme porcherie, égout, ou flaque.

Même le mot « roi » commence à déranger.

(Ne parlons pas de « reine »).

Jadis les rois étaient plus accessibles.

Aujourd'hui, plus tellement.

Pourtant, si nous étions capables de trébucher

sur un papillon dans une porcherie ;

ou si nous devions descendre

dans la noirceur des égouts

pour contempler une grappe de nuages ;

ou si nous trouvions un ruban bleu

embourbé dans une flaque de sang,

nous y pourrions distiller un peu de poésie.

Mais avec un roi, rien du tout.

Avec un roi, rien ne me vient à l'idée

cet après-midi de printemps

pour arranger un poème.

Les rois n'ont pas la côte.

Ils enlaidissent tout ce qu'ils touchent.

Même les porcheries.

Même les égouts.

(Bien sûr, ce ne sera pas moi qui proposera

de placer dans un poème un roi

dans une flaque de sang.

L'éducation que j'ai reçue m'en empêche.)

DISNEYLAND

Quand je rentre du travail, tu es déjà réveillée. Pendant que tu te douches, je prépare le petit déjeuner.

Ensuite tu pars au travail, et je me couche.

Mais avant j'aime bien que tu me bordes et que tu me donnes un baiser

dont on ne sait jamais s'il dit bonjour ou bonne nuit.

Quand quelqu'un nous parle d'avoir des enfants, nous rions à l'unisson,

devant le regard hébété des détectives privés de service.

Vous voulez Disneyland, mais Disneyland n'existe pas. C'est une marque.

Et personne ne vit dans une marque,

n'est-ce pas ?